L'avenir de l'IA au Royaume-Uni: Prioriser déploiement et infrastructure
Le Royaume-Uni devrait privilégier l’adoption et le déploiement généralisés de l’intelligence artificielle (IA) plutôt que de tenter de rivaliser avec les superpuissances mondiales dans le développement de modèles d’IA de pointe. Telle est la recommandation centrale du Tony Blair Institute for Global Change (TBI), qui avertit que même un accent sur le déploiement de l’IA nécessitera une augmentation significative de la capacité de calcul domestique du Royaume-Uni et un engagement sérieux envers le développement des infrastructures.
Selon le récent rapport du TBI, le Royaume-Uni manque des ressources substantielles — y compris le capital financier, les terrains disponibles et l’énergie — nécessaires pour rivaliser avec les investissements colossaux réalisés par les États-Unis, la Chine et les États du Golfe dans de vastes centres de données énergivores pour l’entraînement de l’IA. Au lieu de cela, l’institut soutient que les gains économiques de la Grande-Bretagne se trouveront dans la démonstration d’une application efficace de l’IA dans des secteurs critiques comme la santé, l’éducation, le gouvernement, la défense et la science, stimulant ainsi la productivité, améliorant les services publics et stimulant l’innovation.
Cependant, la poursuite de cette stratégie axée sur le déploiement reste subordonnée à des investissements considérables dans l’infrastructure de l’IA. Bien que le gouvernement britannique ait reconnu ce besoin dans son « Plan d’action pour les opportunités d’IA » et sa « Feuille de route du calcul », le TBI soutient que ces mesures sont insuffisantes. Le rapport décrit la situation actuelle comme « désastreuse », notant que, malgré le fait que l’IA soit au cœur des ambitions de croissance et de sécurité du Royaume-Uni, l’infrastructure nécessaire est à la traîne. À son rythme actuel, le Royaume-Uni est peu susceptible d’atteindre son objectif de 2030 de 6 gigawatts (GW) de capacité prête pour l’IA. Les principaux obstacles incluent les retards de planification et de permis, les contraintes au sein du réseau national et l’escalade des coûts énergétiques industriels.
Cette évaluation est renforcée par un rapport distinct de fDi Intelligence, une division du Financial Times, qui projette un déficit potentiel de 5 GW dans la capacité de calcul des centres de données du Royaume-Uni. Basée sur une analyse commandée par le Département de la Science, de l’Innovation et de la Technologie (DSIT), cette prévision anticipe une demande entre 5,1 GW et 8,5 GW d’ici 2030, tandis que l’offre ne devrait atteindre que 3,3 GW à partir des 1,8 GW actuels. La majeure partie de la capacité existante est concentrée autour de Londres et n’est pas optimisée pour les charges de travail de l’IA.
Pour relever ces défis, le Tony Blair Institute préconise une stratégie de « diversification accélérée » pour construire des infrastructures résilientes. Cela implique d’attirer de nouveaux investissements en réduisant les risques, de distribuer régionalement les capacités de calcul pour améliorer la résilience et de favoriser un écosystème domestique robuste. Les recommandations spécifiques incluent :
Intégration énergétique : S’assurer que l’Opérateur National du Système Énergétique (NESO) intègre pleinement la demande des centres de données dans les plans énergétiques nationaux et soutient cela par des mises à jour dynamiques. Le rapport suggère également de former une équipe dédiée d’experts en IA et en centres de données au sein du NESO pour aider à la planification de la demande et accélérer l’intégration de l’IA dans le système énergétique.
Réforme de la planification : Modifier le processus de planification pour s’assurer que les décisions sont émises dans un délai de huit mois et utiliser les pouvoirs ministériels de « rappel » pour les projets de centres de données et de réseaux à fort investissement. Le gouvernement a déjà désigné les grandes fermes de serveurs comme Infrastructures Nationales Critiques (CNI) et Projets d’Infrastructure d’Importance Nationale (NSIPs), permettant aux développeurs de contourner certains obstacles de planification locaux.
Production d’énergie : Adopter une stratégie pour développer de nouvelles centrales nucléaires de gigawatts et réformer la réglementation nucléaire pour accélérer la construction et réduire les coûts.
Utilisation des terres : Modifier les réglementations pour permettre la colocation des centres de données d’IA avec des sources de production d’énergie et identifier les terrains appartenant au gouvernement pour que les développeurs privés y construisent des centres de données.
Le TBI reconnaît que ces recommandations représentent une entreprise substantielle pour tout gouvernement britannique, souvent caractérisé par une prise de décision lente et des contraintes budgétaires chroniques。
Malgré ces appels à l’action, des préoccupations croissantes au sein de l’industrie concernant le potentiel d’une bulle spéculative de l’IA se font jour. Un rapport de McKinsey & Company a souligné une incertitude généralisée concernant la demande future en IA. D’autres recherches indiquent que l’IA générative n’a pas encore montré d’impact significatif sur les bénéfices ou les heures de travail enregistrées, malgré des milliards investis dans le développement et l’entraînement de modèles. Gartner prédit que 40 % des projets d’IA agentique pourraient être abandonnés d’ici la fin de 2027 en raison de l’augmentation des coûts, d’une valeur commerciale peu claire ou de contrôles des risques insuffisants. De plus, Robin Li, PDG de Baidu, a décrit le secteur de l’IA comme étant dans une « bulle inévitable », semblable à l’ère du .com, et un rapport de Lenovo a révélé que seuls 4 des 33 projets de preuve de concept d’IA étudiés sont passés en production, soit un taux d’échec élevé.
Néanmoins, le gouvernement britannique et le Tony Blair Institute restent résolus dans leur conviction qu’un investissement stratégique dans l’infrastructure de l’IA est primordial. Le TBI conclut que l’incapacité à construire conduira le Royaume-Uni à prendre du retard, tandis que le succès dans la construction de la bonne infrastructure et l’acquisition d’une expertise en application de l’IA présente une réelle opportunité de leadership mondial.